La Value Stream Mapping (cartographie de la chaîne de valeur) est un outil fondamental du Lean Management. Elle permet de visualiser et d’analyser l’ensemble des étapes, des flux d’information et de matières nécessaires à la fabrication d’un produit ou à la livraison d’un service. Construire une VSM, c’est rendre visible l’invisible : gaspillages, temps d’attente, stocks, redondances.
Dans cet article, nous vous montrons pas à pas comment construire une VSM efficace, compréhensible et qui permet de poser des actions.
1. Comprendre l’objectif de la VSM
Avant de commencer à dessiner quoi que ce soit, il faut clarifier l’objectif de votre VSM. Voici quelques exemples typiques :
- Réduire le délai de livraison d’un produit spécifique.
- Identifier les gaspillages dans un processus administratif.
- Améliorer la communication entre les services.
- Lancer un chantier d’amélioration continue.
Conseil : concentrez-vous sur un produit ou service à la fois (appelé famille de produits) pour garder la cartographie lisible.
2. Constituer l’équipe de cartographie
Une VSM ne se dessine jamais seul. Il faut une équipe pluridisciplinaire comprenant :
- Des opérateurs ou techniciens.
- Un responsable de production ou de service.
- Un représentant qualité ou logistique.
- Un facilitateur Lean (si disponible).
L’objectif est d’avoir une vision terrain mais aussi stratégique du processus.
3. Choisir le périmètre et observer le terrain
Délimitez clairement :
- Le point de départ (ex : commande client, entrée matière…)
- Le point d’arrivée (ex : livraison, mise à disposition…)
Puis, allez sur le terrain (le fameux Gemba en Lean) pour observer :
- Le flux des produits/matières.
- Le flux d’informations (bon de commande, planification, ERP…).
- Les temps d’attente, les mouvements inutiles, les erreurs.
Munissez-vous de papier, stylos, chrono et appareil photo si nécessaire. L’objectif est de collecter des données factuelles.
4. Collecter les données clés
Pendant l’observation, concentrez-vous sur ces données :
- Temps de cycle (Cycle Time, CT)
- Temps d’attente (Waiting Time)
- Temps de changement de série (Changeover Time)
- Taux de rendement synthétique (TRS ou OEE)
- Nombre de personnes impliquées
- Stocks ou en-cours entre les étapes
Utilisez une fiche de collecte standardisée pour structurer vos observations.
5. Dessiner la VSM actuelle (état présent)
Une VSM se lit de droite à gauche (de la demande client jusqu’aux matières premières), mais elle se dessine souvent de gauche à droite pour des raisons pratiques.
Voici les composants typiques d’une VSM :
A. Le client (à gauche)
- Demande client (fréquence, volume)
- Canal de communication (ex : EDI, mail…)
B. Le flux d’information (haut de la carte)
- Qui planifie ? Avec quel outil ?
- Quand la production est-elle déclenchée ?
- Utilisation d’ERP, tableau blanc, fichiers Excel…
C. Le flux de production (au centre)
Pour chaque étape :
- Nom de l’opération (ex : découpe, assemblage…)
- Cycle Time (CT)
- Temps de changement (setup)
- Temps d’attente
- TRS (si connu)
- Nombre de personnes
Utilisez des symboles Lean standards :
- Carré pour une opération
- Triangle pour un stock
- Flèches pour les flux
D. Le flux logistique (en bas)
- Transport, stockage, fournisseurs
- Fréquence de livraison
- Méthode (camion, chariot, livraison à la demande…)
E. L’axe temporel (Time Line)
Sous la carte, tracez une ligne du temps avec :
- En haut : temps de valeur ajoutée (VA)
- En bas : temps sans valeur ajoutée (NVA ou MUDA)
À la fin, vous obtenez un lead time total, souvent beaucoup plus long que le temps VA !
6. Analyser la VSM
Posez-vous les questions suivantes :
- Où sont les plus gros stocks ?
- Quelles étapes créent de la valeur ?
- Quels sont les goulets d’étranglement ?
- Quelle est la proportion VA / NVA ?
- Où sont les gaspillages typiques : surproduction, attentes, transports, surtraitement, stocks, mouvements inutiles, défauts (les « 7 Mudas ») ?
C’est à ce niveau que la VSM devient un outil de prise de décision.
7. Dessiner la VSM future (état cible)
Une fois l’analyse faite, imaginez un état cible réaliste, à court ou moyen terme (3 à 6 mois par exemple).
Objectif : réduire les gaspillages et améliorer le flux.
Quelques leviers typiques :
- Réduire les temps de changement (SMED)
- Instaurer un système tiré (Kanban)
- Regrouper des opérations
- Mettre en place des flux en U
- Réduire les stocks intermédiaires
Tracez une nouvelle VSM avec les améliorations envisagées. Elle devient votre feuille de route.
8. Élaborer un plan d’action
À partir de l’état futur, déterminez :
- Les actions prioritaires
- Qui est responsable ?
- Échéances précises
- Indicateurs de performance
Utilisez un plan A3 ou une matrice PDCA pour piloter la transformation.
9. Communiquer et impliquer les équipes
Affichez la VSM dans l’atelier ou le service. Expliquez-la. Mettez-la à jour régulièrement. La VSM est un outil vivant, pas un poster figé.
10. Astuces pratiques
- Utilisez un paperboard ou des post-it pour garder la carte modifiable.
- Travaillez en équipe : chacun a une partie de la vérité.
- Ne cherchez pas la perfection, cherchez l’amélioration.
- Commencez petit, mais commencez !
Conclusion
La Value Stream Mapping est un outil puissant de diagnostic et d’amélioration. Elle permet de faire parler les données terrain, et de révéler les opportunités d’amélioration cachées. En suivant ces étapes, vous serez en mesure de construire une VSM et ainsi cartographier votre premier flux avec rigueur et méthode.
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